Le whisky, fragrance féminine

Editorial | Média

[Extrait]

L’accroche se construit autour d’un jeu de séduction entre l’élixir et moi.
Scénario : Je le vois de temps en temps en soirée, je le scrute de loin. Je n’ose pas l’approcher. Par peur des préjugés et du qu’en-dira-t’on. Il se rend désirable, souvent dans les mains d’une autre. Je lui tourne autour, je l’apprends pour ne pas rater une rencontre décisive quand le moment sera opportun.
L’attraction qu’il dégage est entretenue par des codes, de l’art de cultiver le mystère que revêt l’objet du désir la première fois.
Je me lance, le découvre, tente de l’apprivoiser le malt singulier, détaillant ses attraits d’un air affirmé :

- C’est d’abord la robe, il y a là de la couture, déclinée à l’infini en un spectre du jaune pâle à l’ambré soutenu. Un trait de caractère qui pourrait trahir son âge et ses origines.
- C’est ensuite l’effluve, il y a là du parfum. Du boisé, floral, tourbé, emprunt de bois de fruits ou de céréales, qui réveille l’envie d’un voyage aromatique et gustatif au gré des distilleries sur la route du Royal Scotsman.
- C’est ensuite l'apparat, il y a là du bijou, du tumbler un cristal ciselé comme un diamant Tiffany -whisky is a girl best-friend ?-, que j’observe à loisir tandis que le verre tourne entre mes doigts, pour mieux l’aérer, pour « en faire danser ses jambes ». De la séduction vous dis-je.
- C’est enfin l’écrin, il y a là du luxe, lorsqu’on s’offre à moindre frais une soirée chez Gatsby dans les petits salons du Salomon Rotschild, ou dans l’antre intimiste d’un speakeasy parisien.

Le bon whisky est un breuvage rare qui s’approche en douceur. La rudesse de son image est partout cultivée, comme préservée par une forteresse masculine.
Pourtant son univers est source d’intarissables curiosités déclinées en possibilités gustatives et olfactives. Nectars profonds, émanations subtiles échappées de verres qui tintent comme les pampilles d’un lustre XVIIIe.
Mystérieux inconnu, il se regarde, se respire, s’aère, se goutte du bout de la langue pour mieux tapisser le palais de ses arômes de première bouche, puis se lape avec lenteur, éventuellement additionné d’un trait d’eau minérale.

[Fin de l’extrait]

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WSN Impact Septembre 2022